Se faire éditer : comment éviter les arnaques ?
Se faire éditer : comment éviter les arnaques ?

Se faire éditer : comment éviter les arnaques ?

Dans les années 2000, quand la plupart des gens utilisait internet assez maladroitement, les forums étaient devenus un formidable endroit où partager ses écrits. Personnellement, j’ai commencé l’écriture grâce à eux. C’est aussi grâce aux forums que j’ai appris comment se faire éditer, le processus d’envoi d’un manuscrit en maison d’édition.

Mais à l’époque, il y avait aussi une « arnaque » courante (guillemets car c’est malgré tout une pratique légale) très en vogue : les maisons d’édition à compte d’auteur. Une personne sur deux écrit en France, et se faire éditer est le rêve de beaucoup. En faisant miroiter cette vie : se faire éditer, vendre son roman, être connu en tant qu’écrivain… des entreprises poussaient de jeunes écrivain.e.s à investir de grosses sommes d’argent, pour un service minimum et un résultat souvent décevant.

Je reviens dans cet article sur les différentes maisons d’édition qui existent (à compte d’auteur ou d’éditeur), l’évolution des arnaques qui les a rendues plus discrètes, et je vous conseille sur la façon de repérer une maison d’édition honnête et qui vous conviendra.

Se faire éditer dans une maison d’édition à compte d’auteur : pourquoi pas ?

Pour faire simple, dans une maison d’édition à compte d’éditeur, l’entreprise sélectionne votre manuscrit et « parie sur vous ». Pour se faire éditer, on signe un contrat pour l’autoriser à utiliser notre manuscrit. Ce contrat précise le pourcentage touché par l’auteur lors des ventes, et, en général, prévoit une « avance sur droits d’auteurs » : vous êtes rémunéré à la signature du contrat et/ou à la publication du livre. Même si aucun livre n’est vendu, vous (auteur.ice) n’aurez pas perdu d’argent, seule la maison d’édition a pris le risque financier.

Dans une maison à compte d’auteur, l’entreprise vous propose de prendre en charge différents aspects de la publication d’un livre (correction, maquette, couverture, impression). Pour « financer » ces éléments, elle vous demande de pré-acheter un certain nombre de vos livres, (voire carrément de payer quelques centaines d’euros) sous prétexte que vous saurez bien les vendre vous-même, et que cela remboursera cet investissement.

Bien sûr, si l’on vous demande seulement d’investir pour l’achat de 40 ouvrages, et que vous connaissez déjà 40 personnes qui l’achèteront, pourquoi ne pas se faire éditer par ce biais ? Rien ne vous en empêche, mais faites attention, parce que souvent, la qualité n’est pas là. La communication avec les libraires et les bibliothécaires est inexistante, la promotion de votre livre n’est pas faite, voire les étapes sont bâclées (correction mal réalisée, par exemple).

Mais pour moi, le plus grave, c’est le décalage entre le futur qui vous est présenté (celui d’un.e auteur.ice à succès garanti !) et la réalité (percer dans le monde du livre, c’est dur).

Il y a des alternatives pour se faire éditer qui sont plus intéressantes

Si les maisons d’édition à compte d’auteur ont si bien marché, c’est parce qu‘elles répondent à un besoin réel : celui de se faire éditer lorsque son projet sort des schémas de l’édition traditionnelle, ou lorsque l’on n’a pas le réseau, l’expérience et la chance nécessaires pour être repéré par une maison d’édition.

Mais pour moi, tant qu’à prendre à sa charge le risque financier, l’auto-édition est largement plus intéressante, aujourd’hui en 2022. Elle vous permet de contrôler toutes les étapes de la création de votre livre, de budgétiser vous-même chaque élément et d’avoir une grande liberté. D’ailleurs, j’en parlais ici : parler de l’écriture sur les réseaux sociaux a complètement changé ma perception de l’auto-édition !

Certaines entreprises proposent des prestations de service pour vous accompagner dans votre démarche d’auto-édition. Je trouve cela plutôt intéressant, parce que vous restez maître de vos choix, tout en profitant d’une expertise, dans la mesure de vos moyens.

L’édition traditionnelle a de nombreux défauts et je trouve que celles et ceux qui la remettent en question font un travail intéressant et instructif (même si moi-même je suis très heureuse de ma collaboration avec les éditions Thierry Magnier !). On peut par exemple se faire éditer en se rapprochant de maisons d’éditions collaboratives comme Exemplaire éditions, qui expliquent ici leur démarche.

Bref : une utilisation généralisée d’internet a permis à plus de personnes de reprendre le pouvoir, individuellement ou collectivement, sur une situation où la difficulté de se faire éditer laissait la place aux arnaques, à l’exploitation des rêves. Mais comment, aujourd’hui, repérer une potentielle arnaque auprès d’une entreprise d’édition ?

Se faire éditer sans se faire flouer

Voilà quelques principes vus sur des sites de maisons d’édition. Si ce ne sont pas des preuves de la malhonnêteté de l’entreprise, il faut, pour moi, les considérer comme des alertes sérieuses et redoubler de méfiance !

« Nous éditons de tout, sans limiter notre ligne éditoriale »

Cette phrase est encourageante : cela veut dire que mon projet qui sort des cases peut trouver sa place dans cette maison… Mais en réalité, la ligne éditoriale n’est pas une limite. C’est plutôt un ensemble de repères pour le lecteur (acheteur) du livre et les libraires. C’est aussi le « domaine de compétences » de l’éditeur.

Alors pourquoi s’en passer ? Pour moi, c’est qu’il n’y a pas vraiment de sélection (donc que le but est d’obtenir le plus de projets possibles), et que l’éditeur n’a pas de spécialité littéraire.

« Nous répondons à votre manuscrit sous 15 jours »

Les temps d’attente quand on envoie un manuscrit sont longs, très longs. C’est effectivement très frustrant, mais cela s’explique par le fait que la lecture de nouveaux manuscrits n’est qu’une petite partie du travail dans une maison d’édition. Pour s’organiser, certains donnent un délai approximatif, par exemple : « si nous ne vous avons pas répondu sous trois mois, considérez que votre manuscrit n’est pas retenu ». D’autres ouvrent la réception des manuscrits à une période particulière de l’année seulement.
S’il y a une promesse de réponse aussi rapide, c’est que la priorité de la maison d’édition est la lecture, et l’acceptation des manuscrits. Donc sa priorité n’est pas de s’occuper vraiment des manuscrits qui ont déjà été acceptés ! Cela veut dire que se faire éditer chez eux ne promet pas beaucoup d’attention.

L’obligation d’acheter des exemplaires

C’est souvent présenté sous forme positive : « nous motivons nos auteurs à promouvoir leur livre », ou « nous voulons travailler avec des personnes impliquées, et nous nous assurons de cette application en incluant l’achat de livres dans le contrat ». Il y a aussi un côté rassurant : « ce n’est que 40 livres, ils seront vite vendus »… La réalité – et c’est mon avis subjectif – c’est que tant qu’à dépenser de l’argent pour publier son livre, autant choisir ce pour quoi on le dépense. N’oubliez pas que s’il y a une obligation d’achat, vous êtes un.e client.e et non un.e partenaire professionnel.le.

« L’auteur n’a rien à débourser pour la mise en page, la correction, la conception de la couverture. »

J’ai parfois vu cette affirmation et je trouve qu’il faut vraiment s’en méfier ! Effectivement, en édition traditionnelle, vous n’avez pas à payer ces étapes (contrairement à l’auto-édition où vous vous occupez de tout). Du coup, le fait que ce soit précisé… Je trouve toujours ça louche. Si l’on ressent le besoin de préciser ces évidences… Qu’est-ce qu’elles viennent contrebalancer ?

Il en va de même pour les discours qui ressemblent à « nous ne sommes pas comme ces éditeurs qui… ». C’est louche !

Des avis négatifs en ligne

Une maison d’édition c’est une entreprise : vous trouverez facilement en ligne des témoignages de gens qui partagent leur expérience avec (et pas seulement dans les « avis des auteurs » sur le site internet de la maison que vous envisagez !). Parcourez ces avis et témoignages pour vous faire une idée. Avant de confier votre projet de manuscrit, assurez-vous qu’il soit entre de bonnes mains.

Si les livres du catalogue ne vous font pas du tout envie

Ce dernier conseil n’est pas qu’un détecteur à arnaque : c’est aussi un véritable exercice de confiance en vous. Si rien ne vous fait envie dans le catalogue de la maison d’édition, il est possible que (même si c’est une entreprise de qualité) ce ne soit tout simplement pas une bonne solution pour vous !

Vous trouvez les couvertures moches et les résumés nulles ? Cherchez quelque chose qui vous correspond mieux. J’expliquais plus haut que je suis ravie de travailler avec la maison d’édition Thierry Magnier : c’est aussi parce que j’adore leur catalogue ! C’est d’ailleurs en ayant un coup de cœur pour un de leurs livres que je me suis envisagée leur envoyer un manuscrit.

Si vous êtes à la recherche d’une maison d’édition traditionnelle, je donne ici quelques conseils pour l’envoi d’un manuscrit et maximiser ses chances de se faire éditer !

Et vous, avez-vous déjà eu des expériences plutôt louches avec des maisons d’édition ?

Melody Gornet